AVOCATS Marc BELLEMARE
Québec, le 17 mars 2017
Madame Dominique Vien Ministre responsable du Travail
Ministre responsable de la CNESST
200 Chemin Ste-Foy,
6ième étage Québec G1 R 5S1
Sujet : Pétition concernant la rente viagère réclamée par les accidentés du travail (CNESST)- Dépôt du 21 avril 2016 à l’Assemblée nationale du Québec.
Madame la ministre,
Je réagis à la vôtre du 25 mai 2016 adressée à votre collègue Jean-Marc Fournier, leader du gouvernement, concernant la pétition réclamant la réintroduction des rentes viagères au profit des travailleurs accidentés. Vous référez à juste titre à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LRQ, c. 3.001) en vigueur depuis te 19 août 1985.
Jusqu’à cette date, les accidentés du travail et les victimes d’actes criminels étaient indemnisés de la même façon. La CSST compensait leur salaire jusqu’à concurrence de 90% du net, remboursait les frais d’assistance médicale et leur versait une rente viagère (leur vie durant) correspondant au pourcentage de leur perte de capacité de travail, lequel tenait compte de la nature de la lésion. Depuis le 19 août 1985, les victimes d’actes criminels sont désormais les seules à bénéficier de rentes viagères puisque les accidentés du travail ont vu ces droits abolis.
Dans les faits, pour les accidentés blessés après 1985, les indemnités versées s’éteignent à 68 ans, laissant ces derniers dans l’indigence avec, le plus souvent, la seule rente de retraire versées par Retraite Québec (l’ex Régie des rentes). Cette rente est nettement inférieure et imposable, contrairement aux indemnités versées par la CNESST. Plus encore, du fait que cette dernière ne contribue pas au fonds de retraire de l’accidenté auprès de Retraite Québec pendant ses longues années d’invalidité, la rente de retraite est souvent anémique et plusieurs accidentés seront confinés à l’aide sociale ou devront vendre leurs biens pour subsister.
Vous référez à la prestation d’aide personnelle à domicile et au remboursement des frais d’entretien extérieurs qui continuent, en effet, de s’appliquer après l’âge de 65 ans. Précisons toutefois que cette aide personnelle est versée à très peu d’accidentés, qu’elle est révisable annuellement et qu’elle est minime. Les frais d’entretien, eux, plafonnent à quelque 3 000.$ annuellement, ce qui est dérisoire.
Vous soulignez à juste titre que la rente viagère abolie en 1985 a été remplacée par « un montant forfaitaire pour atteinte permanente à !’intégrité physique ou psychique », communément appelée APIPP. Il faut préciser toutefois que ce montant à versement unique est loin d’équivaloir à la rente viagère d’antan. A titre d’exemple, un travailleur de 50 ans gui auiourd’hui perd complètement l’usage d’un œil (25% d’APIPP) recevra un montant ridicule de 22 075.$, une seule fois, plutôt que 25% de son indemnité de remplacement de revenu, à vie, comme c’est le cas pour les travailleurs blessés avant 1985. Un travailleur âgé de 60 ans recevrait 19250-.$ pour la même blessure. Autre exemple probablement plus fréquent, le travailleur de 50 ans, victime d’une entorse lombaire ou cervicale permanente en 2017, ne recevrait que 1 766.$ pour 2% d’APIPP, ce qui est plus insultant que véritablement compensatoire.
Règle générale, les parlementaires connaissent très peu les mécanismes des régimes publics d’indemnisation, notamment celui de la CNESST dont vous êtes la ministre responsable. Ils auraient certainement intérêt à s’y intéresser davantage. Ils pourraient ainsi apporter les ajustements législatifs appropriés afin de corriger les injustices criantes comme celles-ci-haut relatées. Si vous êtes véritablement intéressée à y remédier, je serais tout à fait intéressé et disponible à vous éclairer dans votre démarche.
Veuillez agréer, madame la ministre, l’expression de ma plus haute considération.
Marc Bellemare, AdE, ll.l
avocat